Depuis des années, on présente le e-learning et plus généralement l’enseignement à distance comme une alternative au mode présentiel. Pourtant, depuis le début de la crise sanitaire, le distanciel est devenu une nécessité, et enseignants et étudiants ont dû s’adapter à la réalité du quotidien. Un an après le début de ces évolutions, nous avons demandé à M HOURI Elie, enseignant les langages informatiques, de bien vouloir revenir sur ces évolutions.
Passer du présentiel au distanciel, cela a-t-il été complexe à organiser ? Et dans quelle mesure ?
Dans mon domaine, le présentiel facilite la transmission des savoirs, non seulement parce que je suis en mesure de voir concrètement l’avancée de chaque étudiant mais aussi et surtout par que le face-à-face assure ce temps de questions-réponses, nécessaire à l’apprentissage des différents langages informatique. Ce dernier tend à disparaître dès lors que l’enseignement se fait à distance. Les étudiants sont plus enclins à interroger quand nous sommes face à eux. Lors de ces cours en présentiel, je suis plus « accessible » pour les étudiants.
Aussi, lorsque nous sommes passés en distanciel, j’ai dû compenser cette moindre accessibilité par la multiplication de schémas, d’explications sous forme de polycopiés. L’informatique nécessite l’expérimentation, et donc avant de se lancer, les étudiants doivent disposer des connaissances nécessaires. C’est donc bien une des grosses évolutions dues à ce passage du présentiel au distanciel, j’ai dû faire beaucoup plus de schémas et de polycopiés de manière générale. Pour ne pas perdre totalement le lien et l’objectif pédagogique, j’ai également dû demander beaucoup plus d’exercices aux étudiants, afin de plus les engager.
Plus de polycopiés et plus d’exercices donc, et cette évolution a-t-elle permis de pallier les obstacles posés par les cours à distance ?
Difficilement, car apprendre l’informatique par polycopié n’est pas évident, et cela a engendré un, rythme beaucoup plus lent qu’en présentiel. Chaque schéma devait être longuement expliqué et suscitait de nombreuses questions de la part des étudiants. C’est un temps plus long, et en distanciel ce temps ne peut être agrémenté d’exercices pratiques, pourtant indispensables. Le distanciel a donc engendré bien plus de travail me concernant. Il fallait préparer ces schémas et ces explications à transmettre aux étudiants. Et pour les étudiants, l’apprentissage est devenu moins agréable, puisqu’eux-aussi plébiscitaient le face-à-face. A chaque cours à distance, des étudiants me demandaient la date du retour du présentiel.
Avez-vous pu évaluer cette évolution des enseignements lors de cette transition ?
C’est difficile de l’évaluer précisément. Pourtant après bien des mois passés en distanciel, j’estime que pour un même apprentissage dans ma matière, les étudiants ont besoin de 30 à 40 % de temps en plus. Enseigner les langages informatiques n’est pas facilement transposable à distance, et le contact reste un atout incontestable pour les étudiants. Il faut beaucoup de concentration, d’esprit d’analyse, et seul derrière un écran, ce n’est pas la meilleure façon de se concentrer.
Estimez-vous devoir conserver une part de distanciel par la suite, après avoir dû y passer ?
Pour mon cas personnel, non. Comme je vous l’ai dit, apprendre à distance n’est guère compatible, selon moi, avec l’absence d’enseignant en face-à-face. En revanche, je comprends que pour certaines autres matières, cette distance puisse représenter un atout à conserver dans l’avenir. Il a fallu s’adapter à cette période si particulière, mais le retour a une situation normale, c’est-à-dire en présentiel, sera bénéfique à tous pour mon domaine d’expertise, en tout cas.